N°90 - Révélé Mustélidé -La Machine de Krapulax détruite

Dans notre dernier numéro (il y a presque un mois!), nous parlions d'une conjuration orchestrée par Pipeau Boy, et sa société, Vault Tech, pour reconstruire la célèbre machine du Professeur Krapulax; vendant des abris antisismiques conçus spécialement pour prémunir des tremblements de terre générés par cette machine, la société Vault-Tech avait fabriqué de toute pièce une menace en assemblant des pièces de rechanges de la machine.

A la suite d'un léger malentendu avec les services secret elmériens, l'auteur de ces lignes a été contraint de voir d'un peu plus près l'Australine (ce qui explique le long délai depuis la dernière édition). Ce séjour forcé était l'occasion de se pencher de plus près sur cette affaire (mais pas trop quand même, pour ne pas tomber, ou alors en se tenant bien).
Au Camps des Bagnards, quelques uns des acteurs de la tragédie pouvaient être vus. Dans l'abri Vaul Tech local (numéroté 001), j'ai pu revoir Pyro Maniak (mais, parce qu'une tenture était placée entre moi et le reste de la pièce, il se trouve que ni lui ni les autres personnes dans l'abri ne me voyaient). A titre de rappel, Pyro Maniak était ce Paradigmien végétarien, voire végétalien, dont on peut dire qu'il tourne dos à la viande. Ayant appris qu'il possédait une pièce de la machine, j'avais taillé la bavette avec lui, par courrier interposé. Sans que je puisse expliquer pourquoi, il s'était alors mis dans la tête que je souhaitais l'aider à punir à coups de tremblements de terre, les mangeurs de viande. (A moins que ce ne fût dû à mon choix de mots?). Mais dans cette affaire, contrairement à ce qu'il a pu penser, Pyro Maniak n'était pas... une grosse légume.
Car comme précisé dans le précédent article, les pièces en sa possession lui furent dérobées par Mistik Killa, un Seelien malfaisant (le masque en peau de vache qu'il portait aurait pourtant dû avertir l'ami des bêtes de ses intentions). C'est aussi au Camps des Bagnards, sur une toute petite jetée inaccessible que je retrouvais la trace du dit Mistik Killa. Quant à Pipeau Boy et à Sardokan Styx, ils étaient, comme on pouvait s'y attendre, au Piton Rocheux.
J'ai eu beaucoup de difficultés à rejoindre le Piton Rocheux. Aucun Kayak n'était à vendre, et il semblait qu'il n'y avait plus moyen d'extraire du bois pour faire des planches, par décision de la Direction de la Production.
(Pourquoi interdire de produire des Kayaks à Camps des Bagnards? Sardokan Styx, qui peu de temps avant encore était le Big Boss, voulait-il empêcher qu'on rejoignît le Piton Rocheux? Ou bien dans sa tentative de faire de l'Australine une nation, plus qu'un bagne le conduisait-il à souhaiter que les exilés ne pussent pas rentrer chez eux?). Toujours est il que je ne dois qu'à un changement, plusieurs jours plus tard, de la politique sylvicultrice australe, dû au nouveau Big Boss, d'avoir enfin pu rejoindre le Piton Rocheux. Que de temps précieux perdu!
Surgi abruptement des eaux, le piton rocheux avait quelque chose qui avait l'odeur des algues et celle de ce plat exotique à base de poisson que j'ai goûté un jour. Je reconnaissais, en arrivant au Piton Rocheux, la Loutre Grillée, qui semblait être le wharf auquel tout le monde accostait. Plusieurs Kayaks, dont un que j'identifiais grâce à mes sources comme celui de Sardokan Styx, y étaient amarrés, soigneusement rangés.
Derrière la Loutre Grillée, un spectacle de désolation s'offrait à la vue. Le laboratoire en ruine du Professeur Krapulax, et, derrière encore, la charpente d'une chapelle dont on ne savait pas très bien si elle était encore en chantier, ou déjà en ruine.
Ce qui me frappa en premier en entrant dans le laboratoire (outre le fait miraculeux que l'intérieur semblait de la même consistance que l'odeur qui régnait partout à l'extérieur, sur le Piton Rocheux) est la foule qui s'y pressait (et la seconde, le fait que personne ne semblât me prêter la moindre attention, probablement à cause de la série de poutrelles effondrées qui me dissimulaient par inadvertance à leur vue).
Une troisième chose me frappa (heureusement que je suis endurant, diront ceux qui ignore tout de la métaphore): je reconnaissais Tohue et Cranio, tous les deux soupçonnés de faire partie d'une organisation criminelle dirigés par un mystérieux Docteur (le Professeur Krapulax?).
Tohue et Cranio étaient tous les deux Seeliens, comme plusieurs autres protagonistes de l'histoire (Mistik Killa, Anyanya le Contre-Nonne, et, dans une certaine mesure, Pyro Maniak, citoyen paradigmien, mais résident en Frankenstanie, territoire seelien). Toutefois, alors que certains parlent d'un complot seelien, il est improbable que cela soit le cas.
Je suis resté à observer passivement ce qui se passait dans ce laboratoire (neutralité journalistique oblige), et la plupart du temps, je faisais en sorte que ma présence ne dérangeât pas les protagonistes (en particulier en faisant en sorte que personne ne s'en aperçût).
Tout au plus, pour faire une légère concession à cette neutralité, ai-je fait importer une ampoule, prétendant qu'elle était une pièce essentielle au fonctionnement de la machine, mais en réalité dans l'unique but d'y voir plus clair. C'est ainsi que j'ai pu voir une veille connaissance, Robin de Cambrousse, toujours masqué (le lâche!) remplacer la courroie de Pyro Maniak par une simple corde, placer un objet métallique de sorte qu'il fît faux contact, et introduire un objet mystérieux dans le réservoir (qui sentait le concombre à plein nez). Plus tard, j'ai appris qu'il s'était arrangé, en complicité avec le Ministère de la Recherche et la Direction des Services Secrets du Khanat Elmérien, pour subtiliser à mon ampoule une ampoule piégée.
Quand la machine fut mise en route, les pièces commencèrent à sauter les unes après les autres... et au bout du compte, alors que Krapulax avait fait marcher l'originale plusieurs fois, sur plusieurs villes, de plusieurs provinces, la machine reconstruite ne fonctionna qu'une seule fois... ou plutôt, disfonctionna une fois, avant de tomber en morceaux (les pièces de rechange à jamais inutilisables).
Mais avant de partir, la machine infernale cracha tout le contenu de son réservoir, et la masse visqueuse s'envola, pour retomber plusieurs heures plus tard sur le Bauhauss.
Aucune autre province ne fut touchée directement, et les tremblements de terre ne ravageront pas le Cybermonde. Mais à jamais le Bauhauss ressemblera à sa voisine, la Plaine Irradiée. Gageons que le bienveillant (mais fourbe) Robin de Cambrousse, qui semble maintenant, si on en croit la rumeur, se faire appeler Robin du Cybermonde, doit s'en mordre les doigts.